Je
regarde sur ma gauche : R. A. S.
Sur
ma droite : des chiens de la casse tenus en laisse
Booba
Je
regarde à gauche et vois des petits chapons excités qui parlent de
« société ». Sur ma droite: des lettrés qui virent
cuistres et parlent du concept de France au lieu de parler de la
France.
Il
y a quelque chose de pourri au royaume de France. De pourri ? Je
vais vous dire (moi le bâtard). C’est que y a pas assez d’amour
gratuit de la France voilà. Amour, de caritas, « faire
attention à », « prendre soin de ». Pas
assez d’amour d’un point de repère commun, amour irrationnel
amour qui se joue des argumentations et des raisonnements
raisonnables. L’on s’en rend compte lorsqu’on va à l’étranger,
lorsqu’on franchit la Manche. La nation de boutiquiers a
bien le sens du gratuit. Du gratuit fermage de gueule et du gratuit
salut au drapeau. Malgré toutes les saloperies qu’ils ont prises
sur le coin de la gueule (certes ils en ont pris bien moins que les
Céfrans) malgré tout ce qu’on a pu leur dire pour essayer de les
dégoûter de l’Union Jack ils aiment leur île pourrie ou il ne
fait jamais soleil comme leurs mères aux yeux bleus. Malgré This
is England.
On
ne jette pas son drapeau dans la flotte à la fin. Le drapeau c’est
le symbole de la cohésion de millions de gens qui vivent en
promiscuité. Cette Pax Romana là, celui qui la jette à la mer
commet un sacrilège. Car alors c’est lui le facho le méchant le
lâche, le diviseur et l’apporteur de guerre civile. Un drapeau ça
se préserve avec mille précautions, tout doucement que ça se manie
comme un petit chat, c’est précieux.
J’ai
fait du TIG au service « matériel et pavoisement » de la
mairie de Grenoble au mois de Juillet 2004. En prévision du 14, le
boulot consistait à accrocher des centaines de drapeaux BBR bien
haut à toutes les hampes de la ville et celui qui fait une allusion
graveleuse je l’emmerde. Un travail formidable avec des gens
formidables, j’ai rarement été aussi heureux de bosser. Des
Gérard quadragénéaires et des Michel moustachus et des Kader un
peu aussi. Au début on ne s’aimait pas et puis peu à peu on a
fraternisés. Autour du drapeau en fait. J’aime à voir les choses
comme ça « oui
parce que je suis lyrique alors euh… un peu con ».
(à
0:27)
Quand
on aime son pays on aime les autres, on aime les gens, on a une
histoire avec eux, on a des raisons d’écraser son petit ego pour
laisser davantage de place à la véritable et non moins galvaudée
notion de vivre ensemble et de communauté d’émotion. C’est de
l’impardonnable non-humilité face au drapeau de nos pères que
naît la désunion et tout le merdier. Flag of our fathers
traduit en français ça fait rigoler les cons, en Amérique ça fait
rien de moins que le titre d’un film grandiose. Le patriotisme
c’est l’amour du prochain, un truc de gauche si l’on veut
outrageusement simplifier. Donc le patriotisme c’est le minimum
légal voilà. Ensuite d’accord éventuellement on peut aller voir
vers la fleur-de-lys, s’étonner que Louis XVI n’était en effet
pas du tout un tyran… Mais d’abord que le curseur soit bien au
centre : à gauche la République, à droite la France. Parce
que le curseur est tellement déboussolé qu’en 2010 il indique « à
gauche l’anarchie, à droite la sociale-dem’. ». En toutes
choses et surtout en politique il est si difficile de construire, et
si facile de détruire. D’agrandir la brèche dans la coque par
laquelle s’engouffrent monceaux de limon, eau salée, pieuvres
infâmes et araignées de mer dégueulasses… Arrivage quotidien.
Facile de dire que de toute façon si ça foire on refera tout en
beaucoup plus mieux en beaucoup plus meilleur mais autre part, une
autre fois, nous les perpétuels réinventeurs de société
interchangeable…
Pardon
je cause comme si nous étions encore en 1920, comme si l’on
pouvait encore faire quelque chose… Mais ils sont déplaisants ces
gens qui parlent de la France comme si c’était un truc lointain,
qui ne nous concerne pas. Comme si on n’était pas en prise directe
avec elle comme par perfusion d’oxygène, de par notre nom notre
langue nos manières nos références… Loin du français je
meurs disait Céline. Lorsqu’il est question de patrie, celui
qui se targue d’avoir de la distance est un cuistre ou un imbécile.
Regardez Titanic : ils font les malins les bonhommes accoudés
au bastingage quand les canots descendent, ils veulent encore jouer
aux gentlemen flegmatiques… Oui mais voilà ils sont sur le
bateau ! Ils oublient qu’ils vivent et respirent grâce au
bateau… Et y a plus de gentlemanie qui tienne lorsque vingt minutes
plus tard tu surnages bouche ouverte et poumons bloqués au dessus de
trois mille mètres d’eau glaciale en pleine nuit et à 800
kilomètres de la première terre qui est le Groënland. Ca meurt
comment un gentleman ? Est-ce que ça suffoque avec élégance
peut-être ? Se noie en révérence ? Retirant ses gants
blancs pour un dernier « au revoir » main qui dépasse de
l’eau et disparaît engloutie joliment ? La belle foutaise…
Vraiment nous ne nous suffisons pas à nous même et il faut se faire
humble devant la France, devant ce qui rassemble.
Vraiment
il n’y a pas de quoi faire les malins à regarder son pays couler
et à dire « je vous l’avais bien dit » comme un Soral
épileptique « mais ça ! J’avais tout prophétisé
dés 1987 si on lit mes livres hein on se rend compte que j’avais
produit cette analyse SERIEUSE hein… et euh voilà». Mec
mais t’as rien produit du tout remballe… Faut pas être grand
clerc pour comprendre que 400 000 haineux et monochromes
« nouveaux arrivants » par an ça sent le naufrage…
Orgueilleux arnaqueur on t’en foutra de la production
d’analyses… Gauche du travail droite des valeurs tu l’as
inventé peut être ? Traduit en un mot composé ça donne
national-socialisme et tu le sais… Moi je dis qu’il n’y a de
véritable patriote que celui qui fait rempart de son corps, couché
en travers du débarcadère des ferrys à Marseille pour empêcher
que le haillon du bateau ne puisse se poser normalement. Regardez en
Israël les colons Hassidim. On peut aimer ou pas ce n’est pas le
problème. Mais expulsés au bulldozer et à la scie à métaux ils
s’acharnent encore à s’agripper aux parpaings, tirés aux pieds
par quatre soldats. Si ces gens là ne sont pas « lumière du
monde » comme ils le prétendent, au moins ils nous éclairent
là sur ce que peut signifier l’amour de son pays et l’amour de
son peuple. Bien loin des « à quoi bon » et des « ça
sert à rien ».
La
seule épreuve dans les choses de l’idéal, c’est la dérouillade
personnelle, sans phrases, sans spectateurs, au petit matin... sortir
du couvert, comme un condamné à mort, amener sa viande aux
"barbelés", au niveau des plus hautes idées, beaucoup
plus haut en fait que les plus hautes Idées... Voilà qui compte...
LF Céline 1937
Que
les outrages au drapeau ne soient pas punis assez sévèrement chez
nous c’est bien la preuve de cette carence en patriotisme gratuit,
évident. Connaissez-vous le délicat photographe Frédéric
Laurent ?
C’est
du manque d’une forme très naïve et spontanée je le crois,
d’amour, que ce pays se meurt. Un amour très simple, presque
imbécile, forcené. Comme ces zalgériens qui ont la fierté de leur
drapeau, qui parlent de leurs « frères » et de leurs
« martyrs ». Nous, nos frères aux yeux bleus meurent
dans la rue en tendant la main. Ils ne meurent pas de faim car il est
impossible de mourir de faim chez nous. Ils meurent d’autre chose,
ils meurent en esprit. Ce n’est pas du flan ces choses là,
l’esprit, les nourritures spirituelles.
Et
l’on finira par la B.O. de A Serious Man qui était aussi
celle de Disjoncté
Somebody
to Love
(Jefferson
Airplane, 1967)
When
the truth is found to be lies
and all the joys within you dies
don't you want somebody to love
don't you need somebody to love
wouldn't you love somebody to love
you better find somebody to love
and all the joys within you dies
don't you want somebody to love
don't you need somebody to love
wouldn't you love somebody to love
you better find somebody to love
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